En quelque endroit que les Oiseaux ayent dessein de construire leur nid, c’est toujours sous quelque abri. Ils cherchent ou des herbes ou une branche épaisse, ou des feuilles doublées sur lesquelles la pluie s’écoule comme sur un toît sans entrer dans la plus petite ouverture du nid qui est caché dessous. Les dehors du nid sont des matieres grossieres pour servir de fondement. Ils y employent les joncs, les gros foins, la mousse, les épines mêmes. Sur cette premiere assise qui est assez informe, ils étendent & plient en rond des matériaux plus délicats, & qui étant bien serrés les uns contre les autres ferment l’entrée aux vents & aux insectes. Mais chaque espéce a son goût & sa façon de se loger. Le logis fait, ils ne manquent point de tapisser le dedans de petites plumes, ou de l’étoffer avec de la laine ou même de la soye pour entretenir une chaleur bienfaisante autour d’eux & de leurs petits. Quand les secours leur manquent, il n’est rien qu’ils n’imaginent pour y suppléer. C’est ce qu’on a remarqué en des Serins, auxquels on n’avoit donné que du foin pour faire leur nid. Faute de coton ou de soye, la femelle eut recours à un expédient admirable ; elle se mit à plumer l’estomac du mâle sans trouver opposition. Puis elle revêtit fort proprement de ce duvet tout l’intérieur de son nid.
Il y a d’autres oiseaux qui ont une autre sorte d’adresse dans la construction de leurs nids, car on remarque que les poils, les crins & les joncs qui les composent sont adroitement croisés & entrelacés. Il y en a comme celui de la Mesange à longue queuë, dont toutes les piéces sont proprement attachées & liées avec un fil que l’oiseau se fait avec de la bourre, du chanvre, du crin, & plus ordinairement avec les toiles d’araignée qu’il trouve lorsque les araignées vagabondes remplissent la campagne de leurs fils. On voit d’autres oiseaux comme le Merle & la Hupe, qui après avoit fait leur nid en enduisent le dedans d’une petite couche de mortier qui colle & maintient tout ce qui est dessous, & qui à l’aide de quelque peu de bourre ou de mousse qu’ils y attachent, forment par dedans une espéce de mur très-propre à conserver la chaleur. Le nid de l’Hirondelle est d’une structure toute différente des autres, il ne lui faut ni bois ni foin, ni lien, elle sçait gâcher une espéce de plâtre & de ciment avec lequel elle se fait & à toute sa famille un logement également propre, sûr & commode. Elle n’a ni seau pour puiser l’eau, ni brouette pour voiturer le sable, ni pêle pour mêler le mortier. Mais on la voit passer & repasser sur quelque bassin, étang ou autre lieu où il y a de l’eau : elle tient ses aîles élevées & se mouille l’estomac sur la superficie de l’eau, puis de la rosée qu’elle fait rejaillir sur la poussiere, elle la détrempe & en maçonne ensuite avec le bec. Or n’est-ce pas une raison admirable qui dirige le travail de ces oiseaux dans la construction de leurs nids ? Car où cet oiseau a-t-il appris qu’il auroit des œufs, qu’il falloit un nid à ces œufs pour les empêcher de tomber & pour les échauffer ; que la chaleur ne se concentreroit pas autour de ces œufs si le nid étoit trop grand : que les petits n’y pourroient pas tenir s’il le faisoit plus petit ? Comment connoît-il la juste proportion de l’étendue du nid avec le nombre des enfans qui doivent naître ? Qui a dirigé sa connoissance pour ne point se tromper au tems, & pour empêcher que la ponte des œufs ne prevînt la structure du nid ?