III

Puissant Palestrina, vieux maître, vieux génie,

Je vous salue ici, père de l’harmonie,

Car, ainsi qu’un grand fleuve où boivent les humains,

Toute cette musique a coulé dans vos mains !

Car Gluck et Beethoven, rameaux sous qui l’on rêve,

Sont nés de votre souche et faits de votre sève !

Car Mozart, votre fils, a pris sur vos autels

Cette nouvelle lyre inconnue aux mortels,

Plus tremblante que l’herbe au souffle des aurores,

Née au seizième siècle entre vos doigts sonores !

Car, maître, c’est à vous que tous nos soupirs vont,

Sitôt qu’une voix chante et qu’une âme répond !

Oh ! ce maître, pareil au créateur qui fonde,

Comment dit-il jaillir de sa tête profonde

Cet univers de sons, doux et sombre à la fois,

Écho du Dieu caché dont le monde est la voix ?

Où ce jeune homme, enfant de la blonde Italie,

Prit-il cette âme immense et jusqu’aux bords remplie ?

Quel souffle, quel travail, quelle intuition,

Fit de lui ce géant, dieu de l’émotion,

Vers qui se tourne l’œil qui pleure et qui s’essuie,

Sur qui tout un côté du cœur humain s’appuie ?

D’où lui vient cette voix qu’on écoute à genoux ?

Et qui donc verse en lui ce qu’il reverse en nous ?

Share on Twitter Share on Facebook