La physionomie extérieure, et particulièrement la gesticulation du Turc, ne sont, considérées comme imitations de la vie, que des imitations très-banales. La physionomie est une œuvre qui ne témoigne d’aucune ingéniosité, et elle est bien dépassée, dans la ressemblance humaine, par les plus vulgaires ouvrages en cire. Les yeux roulent dans la tête sans aucun naturel et sans mouvements correspondants des lèvres ou des sourcils. Le bras, surtout, accomplit ses opérations d’une manière excessivement roide, disgracieuse, convulsive et rectangulaire. Or, tout cela est le résultat de l’impuissance de Maelzel à faire mieux, ou d’une négligence volontaire, la négligence accidentelle devant être mise hors de question, quand nous voyons que l’ingénieux propriétaire emploie tout son temps à perfectionner ses machines. Assurément, nous ne devons pas attribuer à l’incapacité cette apparence hors nature ; car tous les autres automates de Maelzel prouvent sa miraculeuse habileté à copier exactement les mouvements et toutes les caractéristiques de la vie. Ses danseurs de corde, par exemple, sont inimitables. Quand le clown rit, ses lèvres, ses yeux, ses sourcils, ses paupières, tous les traits de sa physionomie enfin sont pénétrés de leur expression naturelle. Chez lui et chez son compagnon, chaque geste est si parfaitement aisé, si bien délivré de toute trace d’artifice, que, si ce n’était l’exiguïté de leur taille et la faculté accordée aux spectateurs de se les faire passer de main en main avant l’exécution de la danse, il serait difficile de convaincre une assemblée que ces automates de bois ne sont pas des créatures vivantes. Nous ne pouvons donc pas douter des talents de M. Maelzel, et nous sommes contraints d’admettre qu’il a laissé volontairement à son Joueur d’échecs la même physionomie artificielle et barbare que le baron Kempelen lui avait donnée dès le principe, non pas évidemment sans dessein. Quel était son dessein, il n’est pas difficile de le deviner. Si l’Automate avait imité exactement la vie dans ses mouvements, le spectateur eût été plus porté à attribuer ses opérations à leur véritable cause, c’est-à-dire à l’action humaine cachée, qu’il ne l’est actuellement, les manœuvres gauches et rectangulaires de la poupée inspirant l’idée d’une pure mécanique livrée à elle-même.