On se propose d’examiner, dans le chapitre suivant, quelle est en Amérique la forme du gouvernement fondé sur le principe de la souveraineté du peuple ; quels sont ses moyens d’action, ses embarras, ses avantages et ses dangers.
Une première difficulté se présente : les États-Unis ont une constitution complexe ; on y remarque deux sociétés distinctes engagées, et, si je puis m’expliquer ainsi, emboîtées l’une dans l’autre ; on y voit deux gouvernements complétement séparés et presque indépendants : l’un, habituel et indéfini, qui répond aux besoins journaliers de la société ; l’autre, exceptionnel et circonscrit, qui ne s’applique qu’à certains intérêts généraux. Ce sont, en un mot, vingt-quatre petites nations souveraines, dont l’ensemble forme le grand corps de l’Union.
Examiner l’Union avant d’étudier l’État, c’est s’engager dans une route semée d’obstacles. La forme du gouvernement fédéral aux États-Unis a paru la dernière ; elle n’a été qu’une modification de la république, un résumé des principes politiques répandus dans la société entière avant elle, et y subsistant indépendamment d’elle. Le gouvernement fédéral, d’ailleurs, comme je viens de le dire, n’est qu’une exception ; le gouvernement des États est la règle commune. L’écrivain qui voudrait faire connaître l’ensemble d’un pareil tableau avant d’en avoir montré les détails, tomberait nécessairement dans des obscurités ou des redites.
Les grands principes politiques qui régissent aujourd’hui la société américaine ont pris naissance et se sont développés dans l’État ; on ne saurait en douter. C’est donc l’État qu’il faut connaître pour avoir la clef de tout le reste.
Les États qui composent de nos jours l’Union américaine, présentent tous, quant à l’aspect extérieur des institutions, le même spectacle. La vie politique ou administrative s’y trouve concentrée dans trois foyers d’action, qu’on pourrait comparer aux divers centres nerveux qui font mouvoir le corps humain.
Au premier degré se trouve la commune, plus haut le comté, enfin l’État.