Un soir d’hiver, nous étions une demi-douzaine d’amis réunis chez un ancien camarade d’Université. L’entretien vint à tomber sur Shakespeare, les personnages de ses pièces, la maîtrise avec laquelle il les avait saisis dans les entrailles mêmes de la nature humaine. Nous admirions surtout leur profonde vérité « quotidienne. » ; chacun de nous nommait des Othellos, des Hamlets, des Falstaffs, voire des Richards III ou des Macbeths – ceux-ci, à vrai dire, seulement en puissance – parmi les personnes que le hasard avait amenées sur sa route.
– Et moi, mes amis, s’écria notre hôte, homme déjà mûr, j’ai connu un Roi Lear !
– Pas possible !
– Si fait. Voulez-vous que je vous conte l’histoire ?
– Nous vous écoutons.
Sans autre préambule, notre ami commença son récit.